Alors que les médias ont un impact considérable sur l’opinion public, le magnat Bolloré détient un véritable empire médiatique.
Comment Bolloré continue son offensive d’extrême droite dans une grande partie des médias français
Une semaine après l’annonce de la tenue de nouvelles législatives, Bolloré intervient dans la campagne électorale en nommant Hanouna comme présentateur d’une émission politique quotidienne à l’antenne d’Europe 1. Cette nouvelle émission, « On marche sur la tête », est dans la droite lignée de la propagande réactionnaire diffusée sur C8 et CNews. Les premières éditions ont été un condensé des obsessions des droites : négation des violences policières, discours racistes. Bien sûr, les intervenants sont uniquement marqués à droite ou à l’extrême droite, avec notamment E. Zemmour en tant qu’invité principal.
Des chaînes régulièrement sanctionnées
Depuis 2012, les chaînes du magnat de la logistique ont été sanctionnées plus de 40 fois par l’Arcom, l’instance de régulation de l’audiovisuel, dont déjà 7 sur l’année 2024. C8 et CNews sont les seules chaînes de la TNT à avoir reçu des amendes. Les sanctions vont de la mise en garde à la sanction pécuniaire en passant par la mise en demeure. L’Arcom peut aussi aller, en théorie, jusqu’à suspendre la diffusion d’un programme ou d’une chaîne entièrement, mais cela n’est jamais arrivé pour le moment.
Entre l’assimilation des défenseurs de la cause palestinienne au Hamas, la défense aveugle de la police et de ses pratiques, les attaques sur fond de racisme, les humiliations en direct, les exemples ne manquent pas. Ce sont tant de cas qui, en temps normal, devraient être sévèrement sanctionnés voire interdits de diffusion sur la TNT.
Les médias Bolloré ou le cheval de Troie du fascisme
Mais ça, nous le savions plus ou moins déjà. Ce qui est inédit, c’est l’accélération de l’offensive Bolloré dans le champ médiatique avec une ambition en tête : réaliser l’union des droites pour les prochaines législatives.
Les médias ont un impact considérable sur l’opinion publique : en mettant en avant quotidiennement des faits divers, en axant les débats sur des thématiques identitaires ou en créant de toutes pièces des paniques morales, ils en la façonnent progressivement. Bolloré le sait bien et l’affiche même publiquement. Il veut imposer son idéologie réactionnaire dans le débat public. Il dispose pour cela d’un empire médiatique qu’il tente en permanence d’étendre, comme en témoigne l’acquisition du JDD et d’Europe 1 fin 2023 et son projet récent de s’accaparer Le Figaro. Les conclusions de l’enquête parlementaire ayant été clôturée en mai dernier sont éloquentes : dans ses médias, le pluralisme est loin d’être respecté.
Une presse contrôlée et et journalistes muselé.es
Hanouna proposant à Eric Ciotti, Sébastien Chenu et Sarah Knafo d’appeler Bardella pour lui proposer de « se réconcilier » sur C8 le lendemain des élections européennes. Robert Ménard, Manuel Valls et Eric Zemmour pour la première édition de « On marche sur la tête » sur Europe 1. Les exemples ne manquent pas : les personnalités d’extrême droite ou de droite ont le champ libre sur ses ondes et s’expriment sans contradiction.
Et au sein de l’empire Bolloré, aucune place n’est laissée à la liberté des journalistes ou des titres de presse : « Dans mes médias, j’ai le final cut » disait Bolloré en 2007 à son entrée dans le secteur. Ses médias doivent favoriser ses intérêts politiques et économiques. C’est d’ailleurs précisément ce qu’il fait en plaçant Hanouna, du jour au lendemain, trois semaines avant des élections anticipées, sur une émission politique à Europe 1 sur un créneau de grande écoute, alors que Touche pas à mon poste est en pause estivale. Objectif de la manœuvre : faire gagner la majorité au Rassemblement national pour mettre en place un gouvernement d’extrême droite.
Lutter, toujours
Alors que faire ? Face à un milliardaire, nous nous sentons comme David contre Goliath. Même si cette bataille culturelle que mène l’extrême droite semble difficilement gagnable, notre mobilisation en faveur d’une presse libre, indépendante et factuelle ne doit pas faiblir.
Individuellement, nous pouvons :
- faire des signalements massifs sur le site de l’Arcom lorsque des propos injurieux, humiliants ou discriminants sont prononcés sur les ondes Bolloré
- signaler aussi les traitements biaisés ou factuellement faux lorsque des opinions nous sont vendues comme de l’information,
- soutenir des médias indépendants.
Car face à la concentration des médias aux mains de milliardaires conservateurs, la presse libre et indépendante joue un rôle essentiel : elle s’efforce chaque jour de démonter les fake news, d’enquêter sur les malversations ou de dénoncer les dynamiques menaçant la presse et par extension la démocratie. Elle représente un contre-pouvoir dont nous ne pourrions pas nous passer.
Mais surtout, c’est en se mobilisant tous les jours face à l’extrême droite que nous pouvons la combattre. En allant dans la rue, en lui opposant un contre-discours solide et émancipateur, en ne reculant pas devant ses intimidations, en étant solidaires.
Pour avoir des clés de compréhension sur les discours médiatiques, nous vous conseillons Acrimed et Arrêt sur images qui sont des sites d’actualités et de critique des médias.
Contre le fascisme rampant et la presse fasciste : on ne lâche rien !